Le BD-boom en Italie, le déploiement d’Amazon en Pologne, la "grande dépression" des professionnels du livre à Moscou… La crise ne cesse de chambouler les marchés du livre dans le monde. Pour en savoir plus, le BIEF propose une revue de presse internationale, réalisée en partenariat avec une dizaine d’Instituts français à l’étranger.
Le site Rynek-Ksiazki.pl annonce le lancement de la version polonaise d’Amazon en Pologne en soulignant les avantages que la vente des livres en ligne aura pour les lecteurs :
"Cet événement constitue la dernière étape en date de la stratégie d’implantation de l’entreprise américaine en Pologne qui a débuté en 2014 avec, principalement, l’installation de plateformes logistiques. Ce déploiement d’Amazon devrait stimuler le secteur du e-commerce polonais en général et de la distribution du livre papier et électronique en particulier. Les acheteurs polonais devaient en effet passer jusqu’à présent par la plateforme allemande d’Amazon. Rynek-Ksiazki.pl note que cette ouverture offrira de nouvelles possibilités aux éditeurs nationaux : 70 000 titres en langue polonaise sont d’ores et déjà proposés à la vente, dont 9 000 pour une livraison le lendemain."
À Moscou, c’est "la grande dépression" pour les professionnels du livre, le marché ayant connu le pire scénario possible en 2020 : après s’être effondré au printemps, il a eu du mal à se redresser. Le magazine Knijnaya Industria a publié un bilan de cette année difficile :
"Des magasins qui n’ont pas rouvert ou n’ont pas pu combler leur déficit, des investissements revus à la baisse pour les maisons d’édition ou des bibliothèques au budget gelé par la pandémie, telle est la réalité du secteur du livre à Moscou fin 2020. Pour les trois premiers trimestres, le bilan de l’industrie du livre est mauvais avec une baisse du tirage moyen à -9,7% par rapport à 2019 ; une baisse du nombre de titres parus (41 154, soit 13,3% par rapport à 2019) et une diminution du nombre de maisons d’édition : si elles étaient 1 759 en 2019 il n’en reste que 1 578 en 2020."
Sondage réalisé auprès des éditions moscovites dans le cadre d’une évaluation en septembre 2020, publié dans le magazine Knijnaya Industria N1, 2021.
China Publishers, Pékin, 12 janvier 2021, extrait de l’article "Avis général des professionnels de l’édition sur le marché du livre en Chine".
Étude à plus grande échelle et bilan moins catastrophique en Chine où le magazine China Publishers a lancé, fin 2020, une enquête auprès de 1 000 éditeurs chinois pour dresser un tableau des performances réalisées par l'industrie du livre pour l’année. Sur la totalité des personnes ayant répondu, figuraient les employés des maisons d'édition publiques pour 59%, ceux des maisons privées pour 25% et les distributeurs/diffuseurs pour 17%. Une grande partie des sondés, soit 30%, juge que les performances de leur entreprise ont été "plutôt médiocres et en légère baisse", 29% qu’elles sont "correctes et dans l’ensemble similaires à 2019", 22% les considèrent "meilleures et en légère augmentation" et 11% trouvent même le bilan "très bon et en croissance considérable". Seuls 8,5% des sondés le jugent "très mauvais".
En Espagne, le ministère de la Culture et des Sports investit 4 millions d’euros dans des livres électroniques pour renforcer le service de prêt en ligne gratuit eBiblio, mis à disposition dans les bibliothèques publiques, rapporte le site Publishnews.es :
"Outre l'élargissement du catalogue, des améliorations seront apportées à la plateforme numérique, dont la nouvelle version a été mise en ligne le 1er février. eBiblio a connu une croissance de 134% en 2020. Afin de répondre à l'augmentation de la demande pendant le confinement, le ministère de la Culture et des Sports avait déjà procédé à un achat extraordinaire de droits à hauteur de 400 000 euros, qui était venu s’ajouter à l'achat ordinaire de droits pour les livres numériques d’une valeur de 500 000 euros. Avec l'investissement de 4 millions d'euros prévu en 2021, le ministère affirme son engagement en faveur d'un service de lecture numérique à distance pour les citoyens, dans le respect des droits d'auteur."
Publishnews.es, Madrid, 17 février 2021
Giornale della libreria note l’essor de la bande dessinée en Europe et plus particulièrement en Italie où le chiffre d’affaires du secteur a augmenté de 42% en 2020 par rapport à 2019. Mais, rappelle le journal, les éditeurs de bande dessinée européens doivent maintenant relever le défi de l’offre numérique :
"[D’après une étude de la Fédération des éditeurs européens, FEE] les éditeurs de bande dessinée considèrent le numérique comme une voie d'avenir, mais l'utilisent pour l'instant surtout comme un outil marketing. Peu disposent de catalogues de bandes dessinées numériques ou utilisent le numérique comme canal de vente. […] L'Union européenne a donc décidé de soutenir cette transition à travers le projet EUDICOM mené par Izneo, une plateforme de distribution numérique de bandes dessinées, qui vise à analyser le marché, puis à accompagner les éditeurs, en particulier les plus petits, en proposant des formations en ligne et en encourageant l'échange de bonnes pratiques au niveau international. Son but est d’accroître la présence des bandes dessinées européennes dans le monde numérique pour semer les graines d'un éventuel leadership européen."
Giornale della libreria, Rome, 16 février 2021
Au Portugal, les tensions entre le gouvernement et les libraires perdurent. En raison du confinement général, en vigueur depuis le 15 janvier, seuls les commerces de biens essentiels sont ouverts et ont désormais le droit de vendre des livres tandis que les librairies restent fermées sans possibilité de pratiquer le Click & Collect. Une situation absurde, déplore le journal Público :
"Le Président de la République a ainsi créé les conditions pour que les librairies deviennent une sorte d'exception ironique : ils sont les seuls lieux exclusivement consacrés à la vente de livres qui désormais ne peuvent plus en vendre. [...] Le réseau des libraires indépendants, RELI, a diffusé un communiqué de presse dans lequel [il demande la réouverture des librairies] car elles sont le meilleur endroit pour vendre des livres, le seul où tous les catalogues de tous les éditeurs [...] petits, moyens ou grands sont représentés, contrairement à l'offre limitée dans les autres espaces commerciaux."
Público, Lisbonne, 13 février 2021